Enjeux de la votation sur l’abolition des forfaits fiscaux
Argumentaire de Wanda Salès Rozmuski, Expert-réviseur agréé
Directrice d’une fiduciaire
Nous savons aujourd’hui mesurer exactement l’impact de la présence des contribuables imposés selon la dépense sur les recettes fiscales de l’Etat, sur notre économie grâce à leur forte consommation de biens et services.
Nous devons nous prononcer le 30 novembre prochain sur les deux initiatives fédérales et cantonales visant la suppression de l’imposition selon la dépense.
Les initiants nous promettent des lendemains radieux car selon eux, ces « forfaitaires fiscaux » ne partiront pas, deviendront des contribuables ordinaires avec comme corollaire, une augmentation des recettes fiscales de l’Etat.
Les défenseurs des forfaits fiscaux nous annoncent d’importantes retombées : Suppression massive d’emplois, trou béant dans les rentrées fiscales, économie en perte de vitesse suite au départ de ces contribuables.
Bien que je me place dans cette dernière catégorie, en réalité aucun d’entre nous ne possède une boule de cristal.
En cas d’acceptation de ces initiatives, nous créerons toutefois une situation incertaine au moment où, suite aux pressions extérieures, la Suisse devra abandonner les statuts fiscaux spéciaux relatifs aux personnes morales ce qui immanquablement aura pour conséquence d’importantes pertes fiscales.
Pourquoi prendre le risque de diminuer l’attractivité de ce pays alors que des états voisins ou lointains et qui ont des systèmes d’imposition similaires à l’impôt sur la dépense, se livrent une concurrence sans merci pour s’attirer les grandes fortunes ? Ils ont leur escarcelle ouverte dans l’attente de cette éventuelle manne que nous n’aurons pas su garder.
Par ailleurs pour l’objet fédéral, il y a un autre objectif qui se glisse subrepticement dans une phrase « les privilèges fiscaux pour les personnes physiques sont illicites ». Ce sont nos déductions fiscales qui risquent de passer à la trappe, les déductions de prévoyance professionnelle, rachat d’années, pilier 3 A, frais d’entretien d’immeuble, frais liés aux économies d’énergie, intérêts hypothécaires. Comme généralement ce sont les contribuables qui ont des revenus élevés qui tirent parti de ces déductions, celles-ci ne manqueront pas d’être considérés comme des privilèges de riches, ce d’autant qu’il faudra compenser les pertes fiscales occasionnées par les possibles départs de « forfaitaires fiscaux ».
Ne nous laissons pas entraîner dans les dogmes qui nous dressent les uns contre les autres. Soyons juste pragmatiques et appliquons la morale de la fable de Jean de La Fontaine « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ».